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L’Argentella…

Les puristes me feront sans doute remarquer que L’Argentella dont je vais vous causer aujourd’hui, n’est plus tout à fait le Filosorma. Certes. Mais, outre le fait qu’il n’est pas interdit de sortir un peu, cette étape sur la route côtière fait partie de mon parcours filosormincu d’une part et a une histoire qui mérite vraiment d’être contée d’autre part.

Mon parcours donc. Au sens strict ! A l’époque où rejoindre Bardiana relevait de l’épopée, train plus bateau sur deux jours, nous finissions notre périple par la poste qui reliait Calvi au village via Galeria. Et la poste s’arrêtait partout, bocca bassa, bocca seddia.. L’Argentella avec ses ruines était tout à fait intrigantes pour le gamin que j’étais puisqu’il m’avait été expliqué que c’était une ancienne mine d’argent. Il aura fallu attendre les dernières vacances de la Toussaint pour que je m’y promène, que je me documente davantage et que vous dise tout ce que je sais désormais sur le lieu avec à l’appui les traditionnelles photos de la Belette Agile. Où l’on verra in fine, que cet endroit a bien failli entrer dans l’Histoire en passant par une porte bien peu sympathique.

Une mine donc. Et ce depuis le 16ème siècle. Le plan Terrier, rédigé à la fin du 18e siècle, fait mention plus tard d’une mine d’argent ouverte par les génois. De quoi attirer les convoitises. A partir de 1847, les mairies de Calenzana et de Moncale accordent les premiers permis de recherche. Mais l’exploitation prendra vraiment son essor dans la seconde partie du 19e siècle. Une est établie en 1856 au nom de la compagnie Moullet puis à un dénommé Collas qui édifie un barrage, construit un port et des bâtiments dont une partie est toujours bien visible. Les rendements ne sont pas suffisants et la mine est rachetée en 1886 par des investisseurs anglais qui fondent l’Argentella Mining Limited. Plus de deux cents personnes travaillent et vivent sur le site avant que l’exploitation soit de nouveau abandonnée vers 1888. Elle reprendra par intermittence avec différents concessionnaires jusqu’en 1930 où tout s’arrêtera de façon définitive.

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Un barrage, des pylônes de téléphérique, de nombreux puits d’extraction, des bâtiments administratifs mais aussi des logements pour le personnel jusque très haut dans la colline, attestent de l’importance des travaux. Une bonne partie de ces installations est visible de la route et il suffit de grimper sur quelques centaines de mètres pour trouver la retenue d’eau. Les plus courageux grimperont jusqu’à la mine dont ont aperçoit l’entrée et les déblais au pied du sommet de l’Argentella.

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Cette partie de l’histoire méritait déjà un petit billet de blog mais la suite est encore plus croquignolette.

En 1960, le gouvernement de Michel Debré envisageât d’implanter sur ce site une base d’expérimentations nucléaires, site qui selon les experts de l’époque, se prêtait parfaitement à ce type d’essais. On retrouve aisément sur le web, les déclarations de Pierre Guillaumat, ministre délégué à l’énergie atomique, sur le thème d’absence d’effet sur l’environnement et la population. De façon assez étrange, ladite population s ‘est méfiée un tantinet et a fait connaître son opposition avec une certaine vivacité. Grève, rassemblements divers et élus allant jusqu’à conseiller au grand Charles de faire péter sa bombinette à Colombey les deux Eglises puisque ça ne présentait aucun risque. Bref, le 14 juin 1960, projet abandonné et direction Mururoa pour la suite qu’on sait.

Je ne crois pas vous avoir menti (c’eut été une première !) en vous disant que l’Argentella méritait un billet. La prochaine fois que vous emprunterez la route de la côte, en voyant la baie de Crovani et Ferraghjola, je gage que vous regarderez les ruines d’un autre œil avec une pensée pour la folie des hommes.

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PS.. le blog que vous parcourez, fait partie d’un site dédié à l’apprentissage de la langue corse. Si vous voulez le découvrir, cliquez sur l’image ci-dessous…