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C’était mieux avant ?

Depuis quelques années, j’ai dû écrire environ cinquante billets sur ce blog.  Ils parlent beaucoup de nature, de mythologie et des temps d’avant. Sans l’avoir fait exprès, c’est peut être inscrit dans notre caractère, ces textes sont souvent empreints de nostalgie. Un temps béni. C’était mieux avant. Et bien non.  Ce n’était pas mieux avant et ceux qui veulent, ici ou ailleurs, jouer sur le fantasme d’un âge d’or révolu jouent une partition malhonnête et qui me déplaît.

Comme souvent, c’est à ma mère que je pense. Un repère de bon sens. Elle avait été jusqu’au certificat comme les jeunes femmes de sa génération. Pas de longues études donc mais une connaissance précise et lucide du fonctionnement des gens et de la société. Et puis, la mémoire de ce fameux temps d’avant, celui de toutes les illusions

Le village était pour moi, comme pour tous ceux qui y passaient des vacances de rêve, un lieu magique. Les gens y étaient bons, la vie facile et les étés très heureux. Surtout lorsqu’on les comparait aux mois passés sur le continent. Collège, lycée, appartement, grisaille. Et personne ne nous disait le contraire. Cette vision de paradis était entretenue par habitude et avec l’idée qu’il fallait que les plus jeunes s’attachent au pays pour que celui-ci continue de vivre.

Je suis assez vieux pour avoir connu la lampe à pétrole, les seaux hygiéniques, la route non goudronnée et l’eau à la fontaine. A chaque nouveauté, il me semblait que c’était un peu de l’âme du pays qui s’en allait. Il faut dire qu’on allume peu la lampe à pétrole pendant les vacances d’été, que ce n’était pas moi qui vidait les seaux ou qui allait chercher l’eau.

Donc, il a bien fallu que Maman m’explique un certain nombre de choses. Comment les familles devaient arroser les jardins la nuit en se partageant l’eau. Départ du village à pied à minuit, une heure avec parfois une longue marche pour ouvrir les rigoles. Comment les femmes lavaient dans l’eau glacée à la cendre puis étendaient le linge dans le maquis en craignant que la crue emporte tout. Comment une hémorragie dentaire, banale aujourd’hui, pouvait prendre une dimension dramatique. Comment les femmes mourraient en couches. Et oui, le docteur à 45 kilomètres, pas de téléphone et une piste bonne pour les calèches, ce n’est pas idéal pour la santé. Et puis, plus tard encore, elle m’a raconté que les gens d’ici n’étaient pas plus gentils qu’ailleurs. En fait, c’étaient les mêmes que partout. Certains étaient bons et d’autres mauvais. Ce n’est pas parce qu’on aime sa famille qu’il faut en ignorer les défauts.

Je me suis souvent demandé pourquoi nous n’avions pas parlé de tout cela avant. En fait, j’ai compris que la Corse avait eu une histoire compliquée dans laquelle, la famille, le village, le clan, avaient une fonction protectrice. Une institution qu’il fallait protéger. Et qui se protégeait parfois par le silence. Comme toutes les institutions.

Pour autant j’aime mon pays et mon village en toute lucidité. Alors pourquoi est ce que j’écris ce billet ? Parce qu’un vent mauvais souffle. Et il utilise la vision revisitée du passé. Il ne s’agit pas de renier ce que l’on est mais il faut ouvrir son cœur. Comme le disait Frederico Garcia Lorca, être citoyen du monde. Etre d’ici et de partout.

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L’automne et ses champignons….

Je vous propose un texte que j’ai déjà publié, il y a quelques saisons, sur le blog. Je l’enrichis d’un fichier son parce que ça fait plaisir à pas mal de visiteurs et je l’enrichis aussi d’une partie dédiée aux champignons et à leur nom en Corse. Démarche mercantile car c’est un des motifs principaux (le principal en ce moment!) des visites. Autant faire plaisir à la chalandise..non ? Les photos sont de Madame, dont le blog est ici.

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J’aime bien l’automne en Corse. On dirait qu’après les brûlantes chaleurs et l’invasion estivale, la terre retrouve le repos et son souffle. Mon village est plein d’une petite musique qui reprend le dessus. Celle de la fontaine sur la place et celle du ruisseau qui après les premières pluies coule de nouveau. De temps à autres, un coup de fusil, le bruit des tronçonneuses dans le maquis, le bois qu’on range près de la maison et les premières flambées qui crépitent. La fraîcheur descend le soir des montagnes et même si les journées sont encore splendides, on sent bien que la saison a tourné. Il faut avoir l’esprit peu ouvert pour regretter l’été et sa violence. Couleurs brutales, canicule, bruit de la foule. Les gens délicats, ceux qui aiment profiter des petits instants miraculeux que nous offre la nature préféreront l’automne comme on préfère une femme belle et discrète à une autre plus brillante mais à l’élégance tapageuse.
Tu te lèves le matin, il y a de la buée sur la fenêtre et tu bois ton café debout en regardant le jardin et les montagnes plus loin, où un léger brouillard résiste. Le soleil sera bientôt vainqueur. Il sera alors temps de mettre les chaussures, une veste pour les premiers instants de la promenade et enfin sortir.
La pinède va t’offrir les safranés, ailleurs si tu as de la chance ce seront des cèpes et des girolles et si tu t’éloignes vers les anciens jardins, ce sont les rosés des pré qui tout blancs dans l’herbe vertes te feront comme des clin d’œil. Il y a une grande tranquillité et en même temps une espèce de tristesse car tu vois bien que toute cette beauté est vide d’humanité. Les murs moussus tombent et les châtaigniers sont abandonnés. Les châtaignes….elles roulent, elles piquent et se laissent cueillir comme des bijoux marrons qui luisent dans un écrin entrouvert. Tu en ronges une à la pointe du couteau et tu ramasses les autres, un panier plein. Ce soir, elles rôtiront sur la braise. Quelques pigeons volent, ce sont des petraghjoli, les ramiers ne sont pas encore arrivés. Il paraît que dans le temps, ils étaient si nombreux qu’ils formaient des nuages, masquant la lumière du jour. Les coups de fusil de tout à l’heure te paraissent moins amusants tout à coup. D’en haut, de la crête, tu vois le village et quelques rares fumées qui montent droit dans le ciel. Des silhouettes qui se hâtent vers le camion du boulanger. Un peu de pain, un bout de charcuterie, près de la source glacée et tu redescendras vers les maisons, les joues rouges et l’âme en paix. L’automne est une saison heureuse pour qui sait voir, entendre et sentir.

Et donc, les champignons les plus répandus en Filosorma et ceux en tout cas, dont je connais le nom en corse. Liste non exhaustive que vous pourrez modifier et compléter à loisir.

Lactaire sanguin, lactaire délicieux : lattosu, lattaghjolu

Cèpe, bolet : sprignolu, capigiallu, capi giallu

Chanterelle, girolle : ghjallisturzu, gallisturzu

Rosé des prés : parachinu (?) pratarellu, pratarolu

Coulemelle ; cappisgiula, cappusgiulu, cappusgiula

Russule : urcu catellu

Coprin : cuprinu, coprinu

Amanites vénéneuses : buletru falzu, boletru falzu

Oronge, amanite des Césars : buletru, boletru, coccu, cuccu, cocca, cocchi

Bolet orangé : albarinu

Bolet tête de nègre : capineru, murellu, murellulu

Boule de neige : leccapecura, leccapecura capinegra

Bolet de Corse : muchjitanu, mucchitanu

Bolet de Satan : mulu, tigniverde

Pied de mouton : pecurinu, picurinu

Bolet jaune : pinnachjolu, pennachjolu, pinnacchiolu

Vesce : vescia

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Quelques astuces de prononciation…

Je ne sais pas chez vous mais ici, il pleut. L’occasion rêvée de produire un texte dominical. Nous avons parlé vacances et pêche. Revenons un instant à la langue. L’idée c’est de tester votre prononciation au travers de quelques phrases dont je donnerai le contexte, anecdote ou histoire. L’authenticité de tout ceci n’est pas prouvée. C’est ainsi que ça m’a été raconté. Alors comme disent nos voisin, si non è vero, è ben trovatto.

La première de ces phrases, je la tiens de Jean-Pierre M. qui donnait des cours à « a scola corsa » de Toulon. Excellent locuteur et doté d’une mémoire phénoménale, il était par exemple capable de réciter tout Florian. Son corse était riche et peu de mots lui étaient inconnus. A la sempiternelle question de savoir si le corse n’était que de l’italien, il répondait qu’il fallait alors proposer à votre contradicteur de dire et traduire la phrase suivante :

A ghjacara ghjacareghja a ghjacarina ch’un li ghjove u prisuttu

Elle signifie (ce qui ne veut pas dire grand chose, j’en conviens) que la chienne se plaint à la façon des chiens car le jambon ne lui profite pas. Une petite observation sur « ghjacaru », une autre façon de dire le chien. Ce mot fait sans doute partie de ceux qui attestent de l’existence d’une langue antérieure au latin qui a formé le corse actuel et nous a donné le « cane » plus répandu.

Alors, essayez vous à la prononcer et vérifier avec le fichier son, ce que ça donne de mon coté ( parler du nord, je le rappelle)

Dans le même registre, Jean-Pierre nous racontait que les espions génois se mêlaient sans trop de problèmes à la population. Mais, il y avait un moyen imparable pour les démasquer. Il suffisait de leur montrer un ciste et de leur demander le nom de cette plante… ils répondaient de façon invariable..un mucchiu…car ils ne maîtrisaient pas la triphtongue « chj » si fréquente en langue corse.

Alors voyons si vous auriez passé le test.. et dites la phrase suivante:

U muchju ind’è a machja

Là encore, le fichier son va vous permettre de vérifier si vous êtes dans le vrai.

D’autres particularités ne peuvent que s’expliquer que par des accents locaux. Prenons l’exemple suivant issu du parler du Niolu… traduisez et dites la phrase qui suit : les gens d’Albertacce s’en descendront par la Scala de Santa Regina.

Vérifiez avec le fichier son. Vous observerez que la façon de dire cette phrase n’a pas grand chose à voir avec sa transcription littérale. Si vous avez traduit mot à mot, ce n’est pas grave et votre façon de la dire est correct. Mais… elle ne sera pas idiomatique. Ce qui n’est pas bien grave en soi. Moins en tout cas que de passer pour un espion génois !

Enfin, un dernier test. Dans les temps troublés qu’a connu l’île, une certaine méfiance s’était installée vis à vis de la justice, celle de Gênes d’abord puis celle de la France. Un problème de compréhension bien illustré par l’expression « l’affari so in francese » pour évoquer un sujet compliqué (les affaires sont en français). Et de fatalisme face à une certaine corruption (réelle ou fantasmée) de l’institution comme en atteste cette autres expression « soldi e amicizia torcenu u nasu a a ghjustizia » (les sous et l’amitié tordent le nez à la justice). Donc, on évitait de trop en dire devant le juge. De ce mutisme provient une dernière expression. Celui à qui le magistrat posait une question, répondait « eau dans la bouche, Monsieur le Juge ». Ce qui nous donne en corse « Acqua in bocca ô sgio ghjudice ! » Et oui, si on ne veut pas que l’eau sorte, il faut garder bouche close. Donc, un dernier test. Prononcez cette phrase et vérifiez avec le fichier son. Si vous passez ces épreuves, la prononciation des triphtongues n’est pas un problème pour vous !

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Pêche en septembre mais aussi…

Pour parler de cette sortie de pêche en septembre, j’ai pensé aux corsophones en enregistrant le texte en corse (je me suis fait plaisir!). Donc, du français écrit et du corse parlé…

De temps à autres, nous sortons pour une pause. M. (pas de nom) collègue, ami, professeur de pêche et facteur de mouches et moi. Il mâche et je fume. C’est souvent là que naissent les grandes idées. Puisque la pêche allait fermer le 20 septembre, pourquoi ne pas passer deux ou trois jours dans le Filosorma ? Un coup de bateau, quelques kilomètres en voiture. Rien de bien compliqué. Décision arrêtée, négociations conclues avec les épouses, il nous restait deux ou trois semaines avant le départ. Deux ou trois semaines pendant lesquelles M. a fabriqué des mouches et où moi je n’ai rien fait de particulier.

Départ un lundi matin pour un retour le mercredi soir. Grand beau temps à l’aller, installés dans des chaises longues sur le solarium du ferry. Une halte à Calvi pour acheter de quoi faire les sandwichs du midi. Le soir bien entendu, diner à la Muvrella, cochon sauvage, assiette du berger, myrte. Du classique et du bon.  L’essentiel n’était pas là.

L’essentiel c’était la pêche. Lundi en fin de journée, coup du soir de Mansu à San Quilicu. Mardi matin au lever du jour, de Tuarelli à Mansu. Mardi soir, remontée vers Candela..Mercredi matin, de Candela à la Cavicchia. Pour être honnête, M. est un vrai pêcheur confirmé et il envoie sa soie naturelle à 20 mètres et plus alors que je suis heureux quand je réussis à poser ma mouche à quinze mètres. Et pourtant, glorieuse incertitude du sport, la surprise a eu lieu. Désolé d’écrire ça, car je sais qu’il me lit. J’ai pris une truite de plus que lui.

Pour être plus clair, je dois dire aussi que j’en ai pris qu’une (au confluent entre le ruisseau de Montestremu et le Fangu) et lui zéro.  Quelques touches, mais des poissons nerveux avec des attaques soudaines impossibles à voir venir. Alors, un mauvais séjour ? Non. Surement pas !

fanguPas de poissons mais une eau tiède et claire. Il faut avoir vu mon compagnon envoyer ses vêtements sur les rochers du coté de la Treccia et se prendre un bain d’anthologie en regardant tout autour de lui, la forêt toute proche et les montagnes plus loin. Puis une baignade aux Force, vous savez, dans la cascade où l’eau de Bocca Bianca est plus chaude en dessous du grand rocher. Juste avant le pique-nique, pain trempé à l’huile d’olive,  oignon, jambon et fromage corse. L’Eden paraît-il. Ce n’est pas moi qui le dit mais lui.

Emmener avec soi quelqu’un qui ne connaît pas le Filosorma est une excellente idée. On ouvre les yeux sur des choses qu’on croit connaître par cœur et qu’on découvre à nouveau. Il regardait les montagnes et le cirque de la solitude qu’il avait traversé deux ans plus tôt et moi, je me rendais compte qu’il n’y avait plus de neige à un endroit où je l’avais toujours vue même au plus fort de l’été. Je lui faisais découvrir le Tafonatu et là aussi, aucun névé. Nous avons traversé la rivière sans problème en sautant de pierre en pierre à des endroits où d’habitude, on ne passe pas. Et ces baignades en septembre dans une eau à 22 degrés ! Un plaisir étrange. Moi qui suis frileux, je suis rentré dans l’eau sans effort. Même en été j’avais du mal.

Pas de truites ou alors très méfiantes. Comme disent les pêcheurs, elles étaient calées au fond. Peu d’eau et une eau chaude. Comme le maquis, les poissons attendaient la pluie.

Ce n’est pas la première fois que je le dis. Mais, il y a longtemps que je n’étais pas allé à Bardiana en toute fin d’été. Et avec des yeux neufs comme je le disais plus haut. La rivière souffre à un point que je n’imaginais pas. Le niveau est bas. Il ne pleut pas. On avait tort de parler de neiges éternelles.  Le Fangu est une rivière sauvage. Il est classé comme tel. Mais, son destin est celui d’un oued qui ne court que lorsqu’il pleut.

Nous retournerons sans doute pêcher l’an prochain, si ces dames nous donnent la permission. Et ce sera tout aussi agréable. Et sans doute encore un petit peu plus triste.

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Terramotu…

Un texte en français et sa transcription sonore en langue corse..

Amical bonjour à toutes et à tous ! J’espère que l’été s’est bien passé pour tout le monde. Quelques jours de randonnée en Écosse, puis deux jours de pêche au village (j’en reparlerai) et du travail en retard. Mais, me revoilà pour vous parler d’un événement bien ancien dont je me souviens comme si c’était hier. Un phénomène naturel où comme souvent en Corse, comme ailleurs j’imagine, les croyances populaires trouvent leur place.

En 1963, le 19 juillet, à 7 heures 46, un tremblement de terre de magnitude 6 a eu lieu au large de San Remo, non loin de la Corse par conséquent. C’était le plus important séisme de la région au vingtième siècle. (voir ici)

J’étais au village en train de dormir dans un de ces lits pliants qu’ont connu tous ceux dont la maison était trop petite pour accueillir la famille en été. La salle à manger ou le salon devenaient une chambre. Bref. Ma mère m’a réveillé en vitesse et m’a pris dans ses bras pour sortir de la maison et monter sur la route où nous nous sommes assis sur la muraillette. J’étais désorienté et presque malade d’avoir été ainsi cueilli dans le sommeil.

Ce que j’ai vu, m’a vite ramené à la réalité. Tout bougeait. Sur l’éboulis près de l’ancien poulailler de ma tante, de grosses pierres se détachaient et roulaient dans le ruisseau. Sur la route, il y avait un âne avec son bât chargé de bouteilles vides. La route dansait et l’âne avec lui. J’ai encore dans l’oreille, le bruit des bouteilles qui sonnaient comme des clochettes. Au bout d’un moment, tout s’est calmé et nous sommes rentrés à la maison. Maman m’a dit que c’était un tremblement de terre.. un terramotu.. la terre qui fait un mouvement. Un mot corse que je n’ai jamais plus oublié.

Pas de victimes et peu de dégâts. Et un souvenir amusant. Quelques jours après, un cousin venu d’un autre village, nous a raconté que le matin du terramotu, sa mère, au lieu de sortir, était en train d’ouvrir toutes les fenêtres et portes de sa maison en demandant aux esprits de sortir. Âme sainte, âme sainte laisse nous en paix.. Elle croyant que les fantômes étaient chez elle et faisait ce que la tradition lui commandait de faire. Son fils lui avait expliqué qu’il valait mieux laisser les fantômes dedans et sortir si elle ne voulait pas que le toit lui tombe sur la tête. Quand on ne comprend pas les choses naturelles, l’idée du surnaturel s’impose. C’est sans doute comme ça que sont nées les religions.

Une pensée pour finir pour nos cousins italiens. Une fois de plus, ils ont été frappés. Et là, il n’y a aucune place pour un sourire.

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Rendez-vous en septembre !

Un texte en français et sa transcription sonore en langue corse en l’honneur du Fangu d’hier et d’aujourd’hui.

Bientôt quelques jours de vacances. Loin de la Corse et du village trop bruyant en été. J’y retournerai dans les premiers jours de septembre pour lancer la mouche dans le Fangu avant la fermeture de la pêche.

Avant de partir, j’ai voulu vous laisser un souvenir. Un film qui a quarante ans. J’ai hésité à la mettre en ligne car je n’ai pas eu l’autorisation des trois jeunes gens qui m’accompagnaient ce jour là. Mais qui va nous reconnaître ? Et puis si ça pose un problème, je retirerai la vidéo.
C’était en septembre aussi. Un lendemain de crue. Le pari c’était de descendre de Bardiana à Manso dans un bâteau pneumatique. San Quilicu, a verga, pozzu di u saltu…Je me dis que nous étions un peu fous même si nous connaissions la rivière par cœur.
Des souvenirs, de la fraîcheur et beaucoup d’eau.
Hélas, le Fangu d’aujourd’hui ne ressemble plus à ça.

Ce film est un souvenir de ma jeunesse mais aussi de ce que fut une rivière sauvage.
Ce que me racontent mes cousins est différent.
Beaucoup trop de monde, une eau sale et le Fangu qui souffre.
Il n’est pas question d’empêcher les gens de profiter mais un peu de respect pour la nature, ce n’est pas trop demander, me semble-t-
Sensible et fragile, sécheresse et surpopulation, la vallée résiste mal.
Mon souvenir est en fait un peu triste. L’eau a couru. Le temps aussi. C’est comme ça. Mais ce n’est pas une excuse pour laisser faire..le fameux lascià corre.
Bon, je ne veux gacher l’été de personne. Pensez juste un instant que vous êtes les locataires de vos enfants. Vous ne profiterez pas moins.

A bientôt amis du Filosorma et d’ailleurs !

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A Foce…

Pour parler du delta du Fangu, j’ai pensé aux corsophones en enregistrant le texte en corse (je me suis fait plaisir!). Donc, du français écrit et du corse parlé…

Ce billet est le dernier de la petite série consacrée à nos ballades de juin.  C’est une promenade un peu spéciale car elle est aquatique. Ce doit être la cinquième ou sixième fois que nous la faisons avec toujours le même plaisir. Il s’agit de naviguer pendant une petite heure dans l’embouchure du Fangu en louant un kayak.

Cette balade est très particulière pour moi. En créant ce blog, je n’avais pas d’autre ambition que de parler du Filosorma. En relisant les billets que j’ai écrits, je me rends compte que sans le faire exprès, j’ai jeté comme un pont entre les souvenirs de mon enfance et aujourd’hui, entre ceux qui ne sont plus et ceux qui peuvent encore découvrir ces lieux de promenade.

A Foce, comme le Tafunatu par exemple, est de ce point de vue un endroit extraordinaire. Lorsque nous étions gamins, l’embouchure du Fangu nous était présentée comme un lieu mystérieux, dangereux même à cause (nous disait-on) des sables mouvants. C’était le refuge des plus gros sangliers et des poissons énormes bien protégés des chasseurs et des pêcheurs par un maquis épais. Il n’était pas question d’y entrer et depuis la route, je regardais cette forêt en bord de plage comme j’aurais pu observer un petit bout d’Amazonie. J’ai noté que le jeune homme qui nous avait loué le kayak, ne savait pas que cet endroit où il passe une bonne partie de son temps se nommait a Foce.

Je vous propose (le lien est ici) de télécharger le document de l’IGN qui décrit la promenade mais raconte aussi l’histoire du lieu.

foce

Un petit conseil toutefois. Comme souvent dans le Filosorma, il faut éviter cette activité au plus fort de la saison estivale. Trop de monde, trop de lumière et trop de bruit. Non, il faut y aller en juin ou en septembre quand la nature reprend son souffle. Le matin ou lorsque le jour décline. C’est le paradis des cistudes. Une petite parenthèse à ce propos. En Corse, la plupart du temps, vous entendrez dire « a cuparella » alors que chez nous, c’est de « tistughjine » dont on parle. Le latin et son « testudines » est tout proche !  Et puis, faites moi plaisir, si vous n’en voyez qu’une ou deux, et même aucune, ne vous plaignez pas. La nature n’a pas d’obligation de résultat.

Le simple fait de ramer tout doucement dans les bras du Fangu, tout près de la plage de a riniccia avec la grande barrière en arrière plan, est un instant magique.  Les nymphéas à eux seuls, méritent le voyage. Si j’ai bien compris, ils n’étaient pas là à l’origine. Un bateau  aurait ramené volontairement ou non, les rhizomes. Un accident de parcours plutôt positif. On ne peut en dire autant à propos des écrevisses de Louisiane dont je découvre en lisant les textes du Conservatoire du Littoral, qu’elles auraient colonisé les lieux.

Il y a les tortues, quelques oiseaux, des nénuphars et puis le bruit de l’eau qui glisse le long du kayak. Une heure de sérénité. Comme toujours, les photos de la Belette Agile (son blog est ici) vous donneront une idée de la beauté de a Foce.

Le plus beau dans tout ça, c’est a Foce, on ne fait que l’effleurer. Le kayak ne pénètre pas au plus profond de la mangrove. Ainsi, le mystère qui entourait ce lieu, demeure presque intact. Il  y a peut être bien des sangliers géants et des truites énormes juste un peu plus loin.. Ça me plaît d’y croire.

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Da vede… Scandula

ll aura fallu quelques années, pour ne pas dire des dizaines, pour que trouve le temps d’aller faire un tour à Scandula ! La randonnée est reposante puisque le bâteau travaille pour vous.. Au départ de Galeria, suivant la formule retenue, ce peut être une sortie de trois heures, sortie dont maintenant je peux dire, qu’il fallait être bien bête pour ne pas l’avoir réalisée plus tôt.

Mon parrain, plaisantin et grand voyageur, avait dit en revenant du Viet Nam « ..chi tanti baie d’Along, un vale Scandula.. ». Mes cousins, avec qui nous avons justement fait la promenade, connaissent aussi la baie d’Along et restant objectifs, nous ont expliqué qu’Along était grandiose mais qu’en effet les couleurs étaient bien plus belles chez nous. Mais qui pouvait en douter ?

C’est en 1975 que la réserve a été créée. J’ai le souvenir de débats assez animés sur ce thème. Toute création d’espace protégé soulève l’hostilité de ceux qui voient, ou pensent voir, leur liberté rognée. En fait, et le guide nous l’a bien expliqué, la ressource halieutique a été depuis multipliée par sept et les pêcheurs y ont trouvé leur compte puisque Scandola, est comme une pouponnière à partir de laquelle les poissons vont peupler des zones où la pêche est autorisée. J’ai le souvenir aussi de ma découverte du balbuzard. A l’époque, premiers pas de l’écologie militante, l’idée qu’une espèce puisse être menacée par le vol des œufs me paraissait surréaliste.

L’alpana, l’aigle pêcheur qui remontait parfois le Fangu quand la mer depuis trop longtemps démontée, lui interdisait de pêcher au large. Et puis, le souvenir du phoque moine, exterminé à coups de fusil pour cause de concurrence avec les pêcheurs. Je découvre que l’INFCOR donne « vechjumarinu » comme traduction alors que par chez moi, il me semble, on disait « vitellu marinu ». Et d’autres animaux qui peuplent la réserve sans parler de la flore terrestre et aquatique.

Tout ça, vous le découvrirez au travers des traditionnelles photos de Madame dont le blog est ici et puis des nombreux textes consacrés à Scandula.

D’autres que moi ont décrit mieux que je saurais le faire la splendeur et l’intérêt du lieu. Par contre, ce qui suit, c’est une histoire que vous ne trouverez nulle part. Une histoire étrange que racontait ma tante à la veillée.

A la mi-août 1918, un berger qui avait sa bergerie au-dessus de l’anse de Fuculara, avait été alerté plusieurs nuit durant par un curieux bruit provenant de la mer. Un souffle. U vechju dicia ch’ellu avia intesu « un cachalot ». Il disait qu’il avait entendu ce cétacé qu’on voyait (longtemps que je ne l’ai plus aperçu) au cours des traversées entre le continent et la Corse. Il disait aussi qu’il avait distingué son corps qui était énorme. Bien entendu, personne ne l’a cru. J’écris souffleur en français car j’ai oublié le nom que ma tante employait. Ca sonnait comme « scuscorzulu » et si quelqu’un peu m’aider à retrouver le mot exact, je lui en saurai gré. Bref, ce n’est qu’après avoir appris que le Balkan avait été torpillé au large de Calvi ( j’ai fait un billet à ce propos ici) que le berger a compris que son souffleur était le sous-marin qui faisait surface la nuit.

Etrange et triste cette histoire. Car ce sous-marin a fait de nombreuses victimes. Maintenant, il n’y a plus de bergers à Fuculara ou Elbu. Et puis, plus guère de veillées. Et ce n’est pas demain qu’on reverra des phoques moines si j’en crois le guide. 35 kilos de poissons par jour, ce sera difficile de trouver un terrain d’entente avec les pêcheurs. Chez nous comme ailleurs, l’harmonie reste un rêve.

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Candela..

Il y a bien des années, aller à Candela était une expédition. Une sortie qui se préparait longtemps à l’avance. Pique-nique, serviettes, rechange, sacs à dos. Une aventure pour les petits et les grands avec un guide, souvent le père, car il s’agissait de rejoindre un endroit mystérieux et lointain. Il y avait ceux qui y allaient et qui en revenaient…je rentre de Candela..et ceux qui écoutaient, un peu jaloux.

Il faut savoir que Candela est un village abandonné et rien que pour ça, il y avait comme une idée de mystère. Allez savoir ce qui se passait la nuit dans les ruines. Ma mère me disait avoir connu la dernière famille à y avoir habité. Elle n’avait que peu de souvenirs sur cette période. Aux lendemains de la guerre, disait-elle. Ils étaient partis, homme, femme et enfants pour ne plus revenir. Il lui semblait que ce n’était pas une famille originaire du Filosorma. Ils étaient partis comme ça, peu de bagages j’imagine, car ceux qui vivaient à Candela ne devait avoir, quant à moi, que le nécessaire et encore.. Selon Maman, la vie était devenue trop dure pour eux  et le hameau trop loin de la route autour de laquelle, des maisons plus confortables étaient désormais construites.

En fait , le village perdu n’est pas si loin que ça. Il est même très près de Bardiana et facile à trouver. Promenade idéale en été pour ensuite manger au bord de la rivière et profiter des jolis trous du côté du confluent.

carte

Le plus simple est de longer la rivière, coté gauche en traversant à San Quilicu pour trouver le chemin en face ou rester sur la rive droite en suivant la rivière. Les deux options se valent. La première longe le fleuve à travers pinède et maquis. La seconde suit également le fleuve à travers les anciens jardins emportés par la crue. La partie plane se nomme “ a furnace ” à savoir la fournaise. Donc, à éviter aux chaudes heures de l’été.

En passant rive gauche, vous arriverez par le haut sur le hameau abandonné. En empruntant la rive droite, il vous faudra traverser la rivière peu de temps après avoir rejoint la piste forestière qui arrive de Montestremu. Il suffit de guetter les ruines et de descendre à vue. Pas de difficulté particulière pour traverser le Fangu à cet endroit-là.

Ensuite, il faut un peu errer dans le maquis à la recherche des maisons effondrées. En fait, il s’agit plutôt de pagliaghji, de paillers améliorés. Encore que, certaines constructions étaient plus vastes que d’autres. Merci encore à mon épouse pour les photos (son blog est ici).

La situation du lieu est remarquable. De l’eau, une bonne orientation. Un endroit est touchant de mon point de vue. C’est à l’entrée d’une des habitations les mieux conservées. Il n’est pas difficile d’imaginer l’endroit où après une journée de fatigue, les hommes devaient s’asseoir pour regarder la vallée. De ce que j’ai pu voir, il ne faudra pas longtemps avant que le maquis l’emporte de façon définitive. C’est logique et implacable mais un peu triste.

A partir de Candela, après les dernières maisons du haut, vous retrouverez sans peine le sentier qui file rive gauche, vers la vallée de Bocca Bianca. Il faut le suivre en étant attentif, car sur la droite, après un quart d’heure environ, il y a un passage vers le trou “  di e force ”, le trou du confluent. Idéal pour le pique-nique et la baignade. Pour rentrer sur le village, à partir des force, il suffit de rester du côté “ plage ” et de suivre le chemin qui ramène en quelques enjambées vers la piste forestière. Pour ceux qui ne la connaissent pas, avant d’attaquer la montée du col, surveillez le départ de chemin vers la droite. C’est celui qui vous ramènera à Bardiana.

Voila, ce n’est pas la promenade mythique de l’enfance mais elle est loin d’être dépourvue de charme et quelques questions demeurent.. Qui étaient ces gens que ma mère a vu partir, que sont devenus leurs descendants ? C’est sans doute là, le vrai mystère de Candela.

PS.. le blog que vous parcourez, fait partie d’un site dédié à l’apprentissage de la langue corse. Si vous voulez le découvrir, cliquez sur l’image ci-dessous…

Bergeries de Saltare..

Deuxième sortie du mois de juin 2016. Après le col de Melza, histoire de dérouiller un peu les muscles, nous passons à une randonnée plus sérieuse. De 800 à 900 mètres de dénivelé suivant le point de départ choisi.

Le but de cette marche est la bergerie de Saltare, étonnant abri que les bergers ont façonné sous un bloc de rhyolite ignimbritique (Une ignimbrite est une roche formée de débris de lave acide issus d’une nuée ardente et soudés avant leur refroidissement, mélangés à une matrice vitreuse..merci qui ? Merci Wiki!),

Elle a été utilisée jusqu’à une période récente par des bergers du Mansu ou de Montestremu et est toujours fréquentée comme bivouac pour ceux qui montent vers le Mont Saltare ou la Ucella, au pied du col des Maures, point à partir duquel il est possible de faire la traversée vers l’Andatone (confer à ce propos Corse sauvage le blog est ici),

C’est un aller retour qui ne présente pas de difficultés majeures à condition d’être attentif sur certains points où il est possible de perdre le chemin, naguère bien entretenu,

carte

Une alternative au départ.. soit à partir de la piste qui démarre avant Montestremu,,,, soit en suivant le fleuve dès Bardiana, toujours sur la rive droite.

C’est cette dernière option que je conseille.

En partant de Montestremu, il faut franchir à l’aller et au retour le petit col ce qui rajoute une bonne centaine de mètres. L’avantage c’est qu’on ne peut se perdre puisqu’il s’agit de suivre presque jusqu’au bout la piste qui rejoint le captage de la Cavichja,

En partant de Bardiana, il faut passer en dessous du snack « a muvrella » et au retour y boire une bière (!), emprunter la passerelle et avant d’arriver au fleuve, tourner à droite pour trouver le chemin qui longe le Fangu (toujours rive droite!). Vous rejoindrez, au bout de ¾ d’heure environ la piste forestière du captage, évoquée plus avant,

A partir de là, les itinéraires sont identiques. Ils remontent la vallée de la Cavichja,

Il ne faut pas aller jusqu’au captage.. après un radier, surveillez la piste et avant un regard en béton, descendez vers la rivière que vous traversez à gué pour retrouver le chemin en face.

Si vous arrivez au captage..tant pis..traversez et montez tout droit (raide!) sur une cinquantaine de mètres pour retrouver le chemin qui suit une courbe de niveau jusqu’au traghjettu di u zoppu, le gué du boiteux. Traversez.. Vous étiez rive gauche, vous repassez rive droite.

La montée en lacets va jusqu’à un petit col à partir duquel vous avez une vue imprenable sur i cascitonni..le cirque de la solitude pour les non corsophones.

Redescendez vers le ruisseau et vigilance car le chemin n’est pas aisé à trouver. Il faut traverser le ruisseau et monter tout droit. Un passage un peu délicat va se présenter à vous car deux pins obstruent le chemin entre deux blocs de rocher. Continuez à monter à vue…un premier gros rocher, puis un second vont se découvrir dans la pinède. C’est la bergerie.

Dans le temps, sous un bloc, près de Saltare, il y avait une source et le tuyau pour amener l’eau courante au bivouac. Je ne garantis plus cet élément de grand luxe.

Bon, compter trois heures pour monter et deux heures pour descendre… au minimum. Trois heures trente à la montée est un pronostic plus raisonnable.

Retour par le même chemin et merci à Madame pour ses photos (son blog est ici).

PS : attention au temps ! Il tourne vite et il nous a fallu redescendre plus tôt que prévu sous la pluie alors qu’à Bardiana, c’était grand soleil.

PS.. le blog que vous parcourez, fait partie d’un site dédié à l’apprentissage de la langue corse. Si vous voulez le découvrir, cliquez sur l’image ci-dessous…