Un Roi corse..un Rè corsu

Le destin « lui accorda un royaume et lui refusa du pain. »

Selon moi cette épitaphe est extraordinaire. Elle a été rédigée par Horace Walpole, poète anglais, et figure sur une stèle en mémoire du seul roi que la Corse ait connu. Théodore de Neuhoff.

Son règne n’a duré que huit mois et les ennemis de la Corse, notamment les génois, en ont dit beaucoup de mal. Peu de gens le connaissent et c’est dommage car son histoire mérite d’être connue. Une façon de rendre justice. Car c’est un personnage historique qui a eu son importance.

Il serait né à Cologne en 1694, dans une famille de nobles. Jeune, il se lance dans une carrière militaire et diplomatique.  On le retrouve aux intérêts des Stuart, puis à la cour d’Espagne et même à Paris où il est compromis dans la faillite de la Banque Law. Réfugié à Madrid, il entre au service du roi du Portugal ce qui le conduit en Italie où il se trouve, lors de l’intervention autrichienne en Corse en 1731.

Contrairement à ce que la légende raconte, ce n’est pas un gentilhomme de fortune qui aurait débarqué en Corse par hasard. Il appartient à cette catégorie d’aventuriers qui courent l’Europe pour participer aux luttes politiques et aux conflits, en espérant obtenir des postes importants dans les pays qu’ils ont aidés. Il s’intéresse donc à la Corse et il semblerait qu’il ait rencontré des généraux insulaires à Livourne avec lesquels il y aurait eu discussion sur sa participation à l’insurrection en cours.

En effet, depuis plusieurs années, la colère contre Gènes se faisait plus forte. Des généraux parmi lesquels Iacintu Paoli (père de Pasquale), Sebastiano Costa, Jean-Pierre Gaffory et bien d’autres tentent de trouver des solutions pour financer la révolte née dans le Boziu en 1729, et qui prend de l’ampleur. Mais les généraux ne font pas l’unanimité et ils se tournent vers une personnalité extérieure.

En 1733, après le départ des troupes allemandes de l’île, Théodore s’entretient avec les chefs corses exilés à Livourne (Ceccaldi, Giafferi, Aitelli, Raffaelli) leur promet des secours et décide de  » passer » en Corse au premier avis qu’il recevrait « . Après un périple en Méditerranée, en passant par Tripoli, Tunis, Théodore débarque sur la plage d’Aleria le 20 mars 1736. Du navire anglais qui l’amène, le baron fait débarquer des canons, des fusils, des équipements et même de l’argent.

Le 13 avril, une consulte assemblée au couvent d’Alisgiani accepte Théodore comme roi et rédige la Constitution qui doit le lier aux Corses ainsi que les lois et conventions qui régiront le royaume.

La guerre est déclarée à Gènes mais après l’échec du siège de Calenzana, les corses se rendent compte que le roi Théodore n’a pas les appuis extérieurs nécessaires à la victoire. Théodore de Neuhoff comprend qu’il faut aller chercher du soutien ailleurs, et le 10 novembre 1736,  il s’embarque pour ramener en Corse armes, munitions, mais aussi de nouveaux appuis politiques.

Il ne sera resté en Corse que huit mois et ne reviendra pas malgré une dernière tentative organisée par les anglais en 1743.. S’ensuivra une longue chute. Il fera de la prison pour dettes et sera enterré dans une fosse commune.

Ce roi, qu’on retrouve dans le Candide de Voltaire avait un projet pour la Corse. Une constitution est rédigée, il frappe monnaie, prévoit la création d’une université et rallie des partisans de Gènes.

Il ouvre la route à Pasquale Paoli dont il a côtoyé le père et son destin étonnant mérite d’être connu au-delà de la caricature dressée par ses ennemis politiques de l’époque.

Pour en savoir plus :

La page de l’ADECEC

Celle de l’Accademia Corsa

Ou enfin, le sujet qui lui est consacré par FR3 Corse

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