Je ne sais pas chez vous mais ici, il pleut. L’occasion rêvée de produire un texte dominical. Nous avons parlé vacances et pêche. Revenons un instant à la langue. L’idée c’est de tester votre prononciation au travers de quelques phrases dont je donnerai le contexte, anecdote ou histoire. L’authenticité de tout ceci n’est pas prouvée. C’est ainsi que ça m’a été raconté. Alors comme disent nos voisin, si non è vero, è ben trovatto.
La première de ces phrases, je la tiens de Jean-Pierre M. qui donnait des cours à « a scola corsa » de Toulon. Excellent locuteur et doté d’une mémoire phénoménale, il était par exemple capable de réciter tout Florian. Son corse était riche et peu de mots lui étaient inconnus. A la sempiternelle question de savoir si le corse n’était que de l’italien, il répondait qu’il fallait alors proposer à votre contradicteur de dire et traduire la phrase suivante :
A ghjacara ghjacareghja a ghjacarina ch’un li ghjove u prisuttu
Elle signifie (ce qui ne veut pas dire grand chose, j’en conviens) que la chienne se plaint à la façon des chiens car le jambon ne lui profite pas. Une petite observation sur « ghjacaru », une autre façon de dire le chien. Ce mot fait sans doute partie de ceux qui attestent de l’existence d’une langue antérieure au latin qui a formé le corse actuel et nous a donné le « cane » plus répandu.
Alors, essayez vous à la prononcer et vérifier avec le fichier son, ce que ça donne de mon coté ( parler du nord, je le rappelle)
Dans le même registre, Jean-Pierre nous racontait que les espions génois se mêlaient sans trop de problèmes à la population. Mais, il y avait un moyen imparable pour les démasquer. Il suffisait de leur montrer un ciste et de leur demander le nom de cette plante… ils répondaient de façon invariable..un mucchiu…car ils ne maîtrisaient pas la triphtongue « chj » si fréquente en langue corse.
Alors voyons si vous auriez passé le test.. et dites la phrase suivante:
U muchju ind’è a machja
Là encore, le fichier son va vous permettre de vérifier si vous êtes dans le vrai.
D’autres particularités ne peuvent que s’expliquer que par des accents locaux. Prenons l’exemple suivant issu du parler du Niolu… traduisez et dites la phrase qui suit : les gens d’Albertacce s’en descendront par la Scala de Santa Regina.
Vérifiez avec le fichier son. Vous observerez que la façon de dire cette phrase n’a pas grand chose à voir avec sa transcription littérale. Si vous avez traduit mot à mot, ce n’est pas grave et votre façon de la dire est correct. Mais… elle ne sera pas idiomatique. Ce qui n’est pas bien grave en soi. Moins en tout cas que de passer pour un espion génois !
Enfin, un dernier test. Dans les temps troublés qu’a connu l’île, une certaine méfiance s’était installée vis à vis de la justice, celle de Gênes d’abord puis celle de la France. Un problème de compréhension bien illustré par l’expression « l’affari so in francese » pour évoquer un sujet compliqué (les affaires sont en français). Et de fatalisme face à une certaine corruption (réelle ou fantasmée) de l’institution comme en atteste cette autres expression « soldi e amicizia torcenu u nasu a a ghjustizia » (les sous et l’amitié tordent le nez à la justice). Donc, on évitait de trop en dire devant le juge. De ce mutisme provient une dernière expression. Celui à qui le magistrat posait une question, répondait « eau dans la bouche, Monsieur le Juge ». Ce qui nous donne en corse « Acqua in bocca ô sgio ghjudice ! » Et oui, si on ne veut pas que l’eau sorte, il faut garder bouche close. Donc, un dernier test. Prononcez cette phrase et vérifiez avec le fichier son. Si vous passez ces épreuves, la prononciation des triphtongues n’est pas un problème pour vous !
PS.. le blog que vous parcourez, fait partie d’un site dédié à l’apprentissage de la langue corse. Si vous voulez le découvrir, cliquez sur l’image ci-dessous…