Falloir….

Il faut bien vivre ! Et comme traductions (nombreuses !) et rédaction du blog, se font sur la base d’un principe de gratuité, ce n’est pas ça qui fait bouillir la marmite. Bref, peu de billets depuis quelques temps mais je ne m’étais jamais imposé de ce point de vue, une quelconque obligation de résultat.

Au fil des traductions qui me sont demandées, je vois apparaître des demandes récurrentes. Une curiosité ou une difficulté si on veut, a appelé mon attention. Il s’agit de la gestion du verbe « falloir ».

En français, il s’agit d’un verbe du troisième groupe qui est un pur exemple de verbe impersonnel. En effet, il ne se conjugue qu’à la 3ème personne du singulier. On le retrouve parfois en forme pronominale « s’en falloir » mais ce n’est pas l’essentiel du sujet. Par contre, et nous allons voir que c’est une difficulté supplémentaire, falloir se conjugue en français avec l’auxiliaire « avoir ».

Pour en finir avec cette introduction, il est nécessaire de rappeler les sens de ce verbe. Il exprime le devoir, le besoin, la nécessité voire la convenance.

Donc, vous devez traduire en corse la phrase suivante.. il faut descendre au village..

Votre premier réflexe et il est légitime c’est de consulter un dictionnaire et bien entendu vous choisissez l’ADECEC INFCOR qui est une référence. Plusieurs propositions apparaissent :

abbisugnà, abbisognà, bisugnà qui signifie  : avoir besoin, nécessiter; falloir.
La nuance de ce verbe est relative au besoin . Elle n’est pas adaptée à la phrase que vous voulez traduire.

Il en va de même pour « appartene » qui dans lequel on retrouve la nuance de devoir.. il vous incombe, il vous appartient de ..

Même souci avec « occorre » où c’est la nécessité qui s’exprime..

C’est en toute fin de liste que vous trouverez la solution avec « vulè, volè ». Soit le verbe « vouloir ». Et oui en corse, ce verbe a une double acception «  vouloir » et « falloir ».

Et donc la traduction de  « il faut venir descendre au village » va nous donner « ci vole da fallà in paese »
Il faut bien comprendre..ci vole da capisce bè…etc etc..

Mais, que se passe-t-il si (et il s’agit de tournures courantes) vous voulez traduire la phrase suivante « il a fallu descendre au village ». Vous vous souvenez qu’en français, falloir se conjugue avec l’auxiliaire avoir. Donc, et cela semble logique, vous proposez « a vulsutu   da fallà in paese ». Hélas, ça ne marche pas. Ce que vous venez d’écrire est doublement incorrect car vous aurez « il a voulu  de descendre au village ». Supprimez donc le « da » pour écrire « a vulsutu fallà in paese » et ça ne marchera pas non plus car votre phrase signifie «  il a voulu descendre au village ». Ce satané verbe « vulè » manque de plasticité !

La solution ? Je ne vais pas faire durer le suspense.. c’est l’utilisation de l’auxiliaire « être ». Pour traduire « il a fallu », il faut penser « il est fallu » donc, « ci è vulsutu ».

Quelques phrases pour bien comprendre.. il a fallu manger…ci è vulsutu da manghjà… il a fallu monter.. ci è vulsutu da cullà.. et ainsi de suite.

Et bien entendu, on débouche sur un exercice de conjugaison pour respecter les temps.

Il faudra descendre…ci vulera da fallà.. il fallait monter …ci vulia da cullà… etc.. etc…

Néanmoins, vous pouvez utilisez les verbes que j’ai cités plus avant lorsqu’il y a une nuance de besoin..il faut que je marche…bisognu da marchjà… Une nuance de devoir…il faut que tu viennes….  « t’appartene di vene » ou « occore a tè di vene » ou enfin et bien plus usité « tocca a tè di vene » qui signifie, il faut venir parce que c’est ton tour ! !

En conclusion, un petit exercice auquel vous pourrez répondre. Comment traduiriez vous la phrase qui suit « il aurait fallu venir à la maison » ?  Tocca a voi ô zitté ! !

PS.. le blog que vous parcourez, fait partie d’un site dédié à l’apprentissage de la langue corse. Si vous voulez le découvrir, cliquez sur l’image ci-dessous…

7 réflexions sur « Falloir…. »

  1. elevu

    Bonjour 🙂

    « il aurait fallu venir à la maison »
    Ci saria vulsutu da (o à ?) vena in casa. (in suttanacciu)
    Ci seria vulsutu da (o à ?) vene in casa. (in supranacciu)
    ?

    On dit « à » ou « da » après vulè ?
    Vous dites « da ».
    http://gbatti-alinguacorsa.pagesperso-orange.fr/grammaire/tournures.htm#ILFAUT et http://langue.corse.free.fr/sesta_lizzione/sesta_lizzione.htm#ci_vole disent « à ».
    L’emploi de l’une ou de l’autre des tournures dépend de la localité ?

    Répondre
    1. linguanostra Auteur de l’article

      réponse parfaite comme toujours.
      Pour le « da »et sa prononciation c’est un brin complexe.
      Da veut bien dire à
      Quand il est placé entre deux voyelles, on ne l’entend pas. Ci vulia da affaccassi.. donnera en phonétique
      tchi voulia a affakassi
      Quand il est placé entre une voyelle et une consonne et qu’on détache les mots, on l’entend
      ci vulia da fà… donne tchi voulia da va
      et quand on parle vite, consonne ou voyelle, on ne l’entend pas
      tchi voulia a va
      C’est un truc classique en apprentissage de la prononciation. Si on veut être certain de ne pas se tromper avec ces lettres mutantes, on détache les mots.
      J’espère avoir été clair…

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      1. Jls

        C’est d’autant plus clair que c’est naturel, (du moins pour moi) . Et qui ne connaît pas le célèbre  » à populu fattu, bisogna’marchja » ?

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  2. elevu

    Oui, sur la prononciation tout est clair. Merci pour la réponse 🙂

    Mais, je ne comprends toujours pas la différence à l’écrit :-s
    (parce que « à » et « da » me semblaient être deux prépositions bien distinctes ; et là, du coup, bah … je ne sais plus. Par exemple, on dit (adiava) mais on écrit « aghju da fà » (avec « da » et pas « à », même si la prononciation ‘oublie’ le « d »). Et là, on trouve souvent l’expression en question écrite avec « à ».)

    Quoiqu’il en soit, merci pour cette précision sur l’auxiliaire. Ce n’est pas une information facile à trouver par soi-même (et puis surtout, faudrait-il encore, pour penser à chercher une telle réponse, se poser la question (!) et donc soupçonner que l’auxiliaire puisse ne pas être le même dans cette expression que dans les autres emplois de vulè…). Un grand merci donc !

    (si j’osais, je demanderais aussi quel est ce « ci » dans cette expression … est-ce le « ci » adverbe « y » (« il y faut(veut)… »), ou le « ci » pronom personnel « nous » (« il nous faut(veut)… ») ? mais la question est sans doute un peu sotte, donc je ne la poserai pas … ;p)

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  3. linguanostra Auteur de l’article

    Les deux mon colonel!!
    Fainéant que je suis, je reprends l’ADECEC:
    ci
    francais : y, nous,
    définition : avv. in istu, in issu locu: abitemu in Bastia è ci stemu bè ( nous habitons à Bastia, et nous y sommes bien) . In Vizzavona ci face u freddu (A Vizzavona, il y a fait froid) .- Cun valore di tempu: trà Petru è Paulu ci corre trè anni (entre Pierre et Paul, il y a trois ans).- Di necessità : per cumprà ci volenu i solli. (pour acheter, il faut des sous)
    et à la fin des verbes… pensaci..y penser..
    Quant à « da », c’est le couteau suisse. Suivant la phrase, il se traduit par: de, par, du, vers, pour, comme, selon, à

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  4. Philippe

    Bonjour et bravo pour ce site.

    Pasquale Marchetti est assez tranché sur la question, il écrit :
    « avè DA fà » MAIS « vulècci À fà »,
    qui deviennent — amuïssement mis à part —
    « aghju da fà » MAIS « ci vole à fà ».

    Bien à vous

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