Début de saison…13ème épisode

Le Filosorma m’a inspiré une (longue) nouvelle policière que j’ai écrite pour rendre service à un copain dont le site sur le SCB périclitait. Je vais la faire paraître ici en quelques épisodes et nous verrons si vous trouvez le coupable avant la fin.. Je précise que pour l’essentiel, toute ressemblance avec des personnes ou des lieux réels est fortuite!!


« Puttana…ci è u pagliaghju chi brusgia… » Ange-Etienne avait dévalé du toit et courait dans la rue montante en criant pour rameuter de l’aide. Il faut croire que les habitants ne s’étaient pas couchés ou avaient fait semblent de le faire en attendant la suite des événements, car, alors qu’il était presque minuit, ils se trouvèrent une vingtaine déjà habillés à le suivre de près. De fait, ils arrivèrent sur ses talons.
Ange-Etienne s’était rué à l’intérieur du pailler. En temps ordinaire, le petit bâtiment était vide. Là, quelqu’un y avait entassé des vieux papiers et des branchages. Un dispositif rudimentaire de mise à feu retardée avait bien fonctionné. Une bougie plantée dans une bouse sèche. La chandelle se consume et le feu prend dès que la flamme atteint la bouse. Placé au milieu de la pièce unique, le brasier brûlait clair. Le patron du bar s’était rué sur le feu qui commençait à lécher les poutres de genévrier.
Il donnait de violents coups de pieds pour disperser le bois qui se consumait et se trouvait du coup tout environné de flammèches. La fontaine n’était pas loin. Un vieil arrosoir qui traînait dans un coin sauta de mains en mains et bientôt le sol était détrempé et noirâtre. Le feu avait vécu…
Toussaint « U guagnese » qui arrivait après la bataille pour avoir ménagé son souffle dans la courte montée, émit le premier commentaire… » …C’est quoi cette connerie? C’est des coups à faire brûler le village… » Il savait bien que le village ne risquait rien. Mais il avait choisi en fin stratège de dramatiser le débat. Comme ça, en réponse il savait qu’il obtiendrait des propos mesurés. S’il avait débuté comme la logique l’aurait commandé en disant que tout cela n’était pas bien grave, il était assuré d’une relance dramatique sur le thème d’une action criminelle qui aurait carbonisé la vallée et provoqué la ruine certaine et peut être même la mort des habitants.
Marco qui connaissait son malicieux comparse, accepta tacitement de jouer la partition… »…Va, avec ce qu’il a plu aujourd’hui, tout est trempé, ça ne risquait pas de prendre… » ce sur quoi Pascal rajouta qu’en laissant un arrosoir sur place, le pyromane avait même prévu de quoi combattre le sinistre. Jamais à court de macagna, il alla jusqu’à se demander si l’incendiaire n’allait pas envoyer un tracker.
U Dragone, Fanfan qui goûtait peu l’humour nocturne et post combustion, revint aux faits « …en attendant, si Ange-Etienne, il ne veillait pas ce soir, personne ne sait où le feu il aurait fini… »…
Toussaint acquiesça et fit remarquer de manière judicieuse que c’est sans doute parce que Ange-Etienne veillait que le feu avait été justement mis là, à un endroit où il ne pourrait pas manquer de le voir, juché sur son toit, comme prévu et annoncé urbi et orbi.
Ange-Etienne eut une légère moue mais ne fit aucun commentaire. Il ne voyait pas très bien ce que cela signifiait si ce n’est que dans l’impossibilité de s’approcher du bar, l’énergumène nocturne avait décidé de l’emmerder à distance. Il invita la petit foule présente à le rejoindre au bistrot pour boire un coup, manière de remercier les pompiers volontaires. C’était là son devoir…
Ils redescendirent en petits groupes sans trop discuter et s’attablèrent en terrasse. Personne ne demanda de café, car tous savaient que ça obligeait Ange-Etienne à rallumer le percolateur. C’était trop de dérangement, pensez. Non, de l’eau ou quelque chose de frais merci. Il faisait doux. Le ciel était parfaitement dégagé et on distinguait parfaitement la Voie Lactée…Demain, il y aurait encore des nuages. Août veut ça… Mais pour le moment, c’était une nuit d’été.
Marc qui donnait un coup de main pour descendre les bouteilles, émit tout à coup, un petit sifflement surpris….il toucha le coude d’Ange-Etienne puis du menton, très discrètement lui désigna le fond de la salle restée obscure… Le patron du bar s’approcha et comprit immédiatement que la télévision avait bougé. Il alluma du coup les néons, attirant par la même ceux qui étaient restés à l’extérieur et qui comprenait devant ce luxe de lumière, que quelque chose se passait à l’intérieur.
C’est entouré de ses clients noctuelles agglutinés autour des lampes, qu’Ange-Etienne rendit son verdict… »On a essayé de la bouger mais comme elle est trop lourde, ils n’ont pas réussi à la prendre… le feu, c’était pour me faire sortir du bar et me voler la télévision… »
C’était rassurant. Un mobile et une explication logique. Le public en aurait presque ronronné d’aise . Enfin, quelque chose de clair. Ange-Etienne eut un petit rire… »…Un grand écran ça pèse…ils l’ont eu où je pense… »
Pascal qui décidément ne pouvait se départir de son esprit moqueur, posa avec la voix comme une flûte, la question qui allait ôter net toute envie de rire à leur hôte… » Et sans tuner, elle marche la télévision grand écran?… » Ils se retournèrent tous d’un bloc….le décodeur avait disparu emportant avec lui le match contre Rennes…
Ange-Etienne fut grand…aux yeux du village, il venait d’être roulé dans une farine bien blanche. Berné. Il devait avoir une réaction à la hauteur de l’événement. Il respira et respira encore en regardant la marque qu’avait laissé l’objet disparu dans la poussière, légère, déposée sur le meuble, puis il dit avec un calme décalé « …Si j’attrape celui qui me fait tout ça, je le tue… »
Fin de partie dans le bar. Les joueurs quittent le stade. On ne se congratule pas et on fera la causerie d’après match, demain, après un petit décrassage d’une nuit.



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